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Détruire ou réformer le système bancaire ?

On le sait tous : la course au profit facile menée par l’ensemble du système bancaire a précipité l’économie mondiale dans une grave crise. A lire les prévisions des analystes les plus critiques, on peut dire qu’on n’est pas encore sorti de l’impasse. Si tout le monde semble d’accord pour dire que, sans changements radicaux, les banques repartent droit dans le mur, les avis sur les méthodes à adopter divergent. Les questions de ratios de fonds propres, d’une éventuelle taxe sur les transactions boursières ou d’un rôle accru des autorités publiques dans le contrôle des établissements financiers restent malheureusement souvent trop techniques pour le citoyen lambda.

D’où cette question qui revient sans cesse sur le net : quelle est notre marge de manœuvre, à nous, citoyens et « petits clients » des banques, pour peser sur la forme que prendra le futur paysage bancaire ?

Première piste, la plus radicale : détruire le système de l’intérieur. 

Une idée qui fait son chemin sur la toile, sorte de vieille utopie inspirée de la scène finale de Fight Club. Faisons péter le système dans son ensemble et reconstruisons sur ses cendres un nouveau paysage bancaire assaini, vierge de toute course effrénée au profit. Des banques citoyennes, qui utilisent l’offre d’épargne pour répondre à la demande de crédit. Rien de plus. L’essence-même d’une banque.

C’est l’idée du site Bankrun2010 qui propose que nous, petits épargnants, allions retirer nos économies de nos livrets tous ensemble le 7 décembre prochain. Le concept s’inspire largement de la vidéo d’Eric Cantona qui a fait le tour de la toile : la révolution de l’épargnant. Le site est largement documenté et explique in extenso les dérives d’un système bancaire qui s’est pris les pieds dans le tapis.


L’idée a de quoi plaire mais se heurte tout de même à plusieurs objections.

1. Qu’on le veuille ou non, le secteur bancaire reste un solide pourvoyeur d’emplois en Belgique. Mettre l’ensemble du système ko en vidant les comptes, c’est provoquer inévitablement la faillite de plusieurs établissements financiers qui représentent, en Belgique, environ 63.000 emplois directs. Si les banques tombent, ce sont les Etats qu’elles entraîneront dans leur chute.

2. Même si elles s’en sont largement écartées ces dernières années, les banques restent un élément central d’une économie viable, de par leur rôle qui consiste à fournir des crédits, pas seulement aux multinationales, mais également aux PME. En détruisant les banques, on coupe l’accès au crédit à des milliers d’entrepreneurs qui se retrouvent à leur tour sur la paille.

3. Les petits épargnants ne pèsent pas si lourd que ça. Ce sont évidemment les gros investisseurs qui pourraient blesser le système en conditionnant leurs placements à de nouvelles mesures d’éthique (nous y reviendrons). Mais le problème, c’est que ce sont ces mêmes investisseurs qui profitent du système actuel : dividendes plantureux, croissance à deux chiffres, etc.

Bref, la révolution par les banques, je veux bien y croire, mais je reste sceptique.

Seconde piste, plus responsable : réformer le système bancaire.

L’une des forces du web, c’est le partage d’une information à laquelle nous n’avions jusque là pas accès. Et si, en tant qu’épargnant, nous pouvions forcer les banques à mieux se comporter ? Comment ? En comparant les politiques d’investissement des différents établissements et en optant, arguments à l’appui, pour ceux qui font preuve d’une réelle volonté d’aller de l’avant en matière de gestion responsable.

Cette démarche, qui demande un vrai travail intellectuel de la part du consommateur, peut être facilitée par une multitude d’outils désormais à votre disposition sur le net… mais qui ne font pas encore grand bruit.

Quelques exemples :

Le site de l’asbl Netwerk Vlaanderen propose une quantité impressionnante d’informations sur les agissements des banques en Belgique et propose régulièrement des pétitions en ligne pour demander à votre banque de mettre un peu plus d’éthique dans ses actions. Mieux, le site propose une analyse très approfondie des banques belges qui disposent chacune de leur fiche détaillée, avec un focus sur leurs investissements dans le secteur de l’armement. Cerise sur le gâteau : un classement régulièrement mis à jour des « risques d’investissements nuisibles ».

Plus ciblé encore, le site banksecrets.eu propose aux visiteurs de découvrir les activités controversées des principaux acteurs du secteur bancaire européen, à l’aide d’une carte interactive. Le site permet ensuite d’envoyer une carte électronique à sa banque pour lui demander de mettre fin à ses activités les moins éthiques, sans quoi le client menace de fermer son compte.

Autre initiative originale, mais uniquement disponible pour la France, le site EpargneClimat permet de mesurer l’empreinte carbone de votre argent en fonction de la banque à laquelle vous avez confié votre épargne. En fonction de vos produits (comptes d’épargne, sicav, etc.), le simulateur vous propose ensuite des pistes simples pour réduire l’impact environnemental de votre épargne.

Conclusion

On n’y est pas encore, mais les outils qui permettent de responsabiliser son « épargne » commencent à se développer sur le net. Libre à chacun de les utiliser à bon escient et de faire son shopping bancaire en fonction de nouveaux critères éthiques. Sans doute une piste qui obligera les banques à écouter plus attentivement les exigences de leurs clients. 

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